Lorsqu’on souffre de diabète de type 1, les risques de développer une maladie coeliaque sont accrus. C’est un constat réalisé par les équipes d’endocrinologie de l’hôpital Necker de Paris. Ces deux maladies auto-immunes seraient donc liées, plutôt dans le sens diabète puis intolérance au gluten que dans l’autre sens. En effet, on entend souvent dans les média que manger sans gluten augmente les risques de diabète (sujet traité dans cet article). Mais la causalité s’exprimait plutôt à l’inverse. Explorons ce sujet ensemble à travers l’histoire d’Arthur, 6 ans et demi, diabétique et coeliaque.
Diabète de type 1 (insulinodépendant), une maladie auto-immune des jeunes
Arthur a été diagnostiqué diabétique à l’âge de 1 an. Ce diabète extrêmement précoce est de plus en plus fréquent en France (il a augmenté de 75% ces dix dernières années). Le développement de la maladie repose théoriquement à la fois sur une prédisposition génétique, héritée des parents, et un facteur déclenchant tel qu’une infection ou un choc affectif. Ce dernier entame un processus auto-immunitaire qui détruit peu à peu les cellules pancréatiques sécrétrices d’insuline. Dans le cas d’Arthur, les médecins n’ont relevé aucun antécédent familial ni facteur déclenchant particulier, mis à part un vaccin peu de temps avant (sans preuve de lien).
Les symptômes du diabète de type 1 ne sont pas évidents à détecter chez un très jeune enfant : Arthur avait soif, certes, mais c’était l’été et il faisait très chaud. Bien sûr, il urinait plus fréquemment et semblait fatigué. Françoise, sa maman, prend rendez-vous chez le pédiatre. Ce dernier s’inquiète pour Arthur qui a perdu 1 kg et soupçonne un diabète juvénile. L’enfant arrive aux urgences pédiatriques à la limite du coma acido-cétosique qui survient souvent lors de décompensation d’un diabète : l’organisme, ne pouvant plus utiliser l’énergie des glucides, se rabat sur les lipides produisant des corps cétoniques (-> haleine caractéristique de pomme verte).
Arthur est aussitôt pris en charge au service des maladies métaboliques de l’hôpital Necker. Entre les examens, les tentatives d’équilibrage de la glycémie, les cours de diabétologie mis en place pour les parents, deux semaines complètes s’écoulent ! Françoise se sent bien épaulée par cette équipe chevronnée et attentive.
La maladie coeliaque, fréquente chez les jeunes diabétiques
Une fois rentré à la maison, Arthur reste étroitement suivi et retourne à Necker tous les deux ou trois mois. Françoise apprend que 30% des petits diabétiques ont des marqueurs sanguins positifs à la maladie coeliaque et au final 1/3 de ceux-là ont une inflammation nécessitant d’arrêter le gluten (confirmation par fibroscopie). Au total 10% des petits diabétiques type 1 doivent arrêter le gluten.
Malgré l’absence d’explication scientifique claire du lien entre diabète de type 1 et intolérance au gluten, la prévalence fait frémir… Les recherches de ces dernières années démontrent en effet qu’une personne souffrant d’une maladie auto-immune (cas également de la sclérose en plaques, thyroïdite, maladie de Crohn) est plus à risque d’en développer une autre.
A l’âge de 5 ans, Arthur est contraint d’éviter le gluten : la prise de sang a finalement révélé les marqueurs sanguins de la maladie coeliaque. Pas de symptômes flagrants, si ce n’est un ventre un peu gonflé qui disparaît suite à l’éviction du gluten : c’est ici une maladie silencieuse.
La vie quotidienne d’un enfant diabétique et coeliaque
Gestion de l’insuline
Le quotidien d’un diabétique est rythmé par les injections d’insuline pour pallier au déficit de sécrétion pancréatique. Pendant 5 ans, les parents d’Arthur ont dû s’occuper de ces injections avant chaque prise alimentaire, calculant la dose de glucides ingérés pour éviter les hypo ou les hyperglycémies néfastes. Françoise est devenue une as de la nutrition ! A l’école, une infirmière se déplaçait pour d’injection du midi.
Depuis quelques mois, Arthur bénéficie d’une pompe à insuline, c’est-à-dire d’une perfusion sous-cutanée continue. Cet appareil lui apporte beaucoup plus de confort au quotidien mais n’est pas sans inconvénients :
Avantages de la pompe | Inconvénients | |||
Arrêt des piqûres 3 fois par jour | Contrôle plus poussé des doses d’insuline en fonction de la glycémie à un instant T et de la dose de glucides consommée | Déconnection obligatoire si immersion (bain, piscine) | Maintenance pour les parents qui doivent changer le cathéter tous les 2 à 3 jours | Risque de manipulation par l’enfant lui-même (aujourd’hui très à l’aise avec le numérique !) -> risque d’augmentation des doses d’insuline à l’insu des parents pour se permettre par exemple des écarts alimentaires (bonbons) |
Gestion de l’alimentation
En plus du contrôle de l’index glycémique des aliments, Arthur a dû tirer un trait sur des produits appréciés comme le pain ou les pâtes. Ces dernières sont notamment un des seuls aliments glucidiques qui permettaient de bien réguler la glycémie le soir avant le coucher. Après avoir testé divers aliments glucidiques, Françoise a découvert que :
- certains légumes secs comme les lentilles vertes ou corail se digèrent tellement lentement qu’Arthur était en hypo au début de la nuit puis en hyper à la fin…
- les repas riches en graisses ralentissent l’assimilation des glucides et engendrent des difficultés à régler la dose d’insuline
- le riz blanc et la pomme de terre sont assez hyperglycémiants.
La solution IG bas et sans gluten la plus adaptée pour le dîner est donc une association de légumes avec du riz complet, une purée pommes de terre / pois cassés ou encore des pâtes à base de sarrasin.
Implication des parents
La gestion d’un enfant diabétique demande énormément de logistique, d’implication et de réflexion pour les parents : apprendre les bases de la nutrition pour mettre en place une alimentation adaptée, calculer les doses d’insuline, faire les piqûres ou changer les cathéters de la pompe…
Le passage à l’alimentation sans gluten a demandé une organisation supplémentaire et beaucoup de temps passé dans les courses et les tests culinaires. Le budget alimentation a également grimpé de 20% ! Ceci dit, le passage au sans gluten a aussi permis de diversifier l’alimentation. Françoise a profité de cet évènement pour faire un break sur le plan professionnel afin de mieux gérer l’intendance, s’initier à la cuisine sans gluten sans être forcément pressée par le temps. Aujourd’hui, elle a repris le travail plus sereinement. Elle apprécie cette cuisine inventive et aime particulièrement réaliser des pâtisseries sans gluten et à IG bas.
Voici une de ses recettes préférées, les madeleines sans gluten :
Ingrédients
(pour 18 madeleines environ) : |
Préparation : |
110 g de mix à IG modéré* (sans farine de riz) : 60 g de farine de maïs + 25 g de fécule de pomme de terre + 15 g de fécule de tapioca + 1 pincée de farine de caroube ou amarante + 1 pincée de psyllium
75 g de cassonade 50 g de beurre ou margarine 2 oeufs 1 citron bio non traité ou une petite cuillère d’extrait d’amande amère ou des pépites de chocolat (ajuster la quantité de sucre en fonction des glucides des pépites) 1 sachet de levure sans gluten (7g) |
Dans un saladier, battez ensemble les oeufs entiers, le sucre puis ajoutez la farine sans gluten et la levure.
Ajoutez ensuite le zeste du citron bien lavé puis le beurre fondu (ou margarine pour une version sans lactose). Beurrez les plaques des moules à madeleines (j’ai deux plaques silicone de 9 madeleines chacune). Remplissez chaque moule de votre préparation. Glissez le tout au réfrigérateur et laissez reposer pendant 1h30. Préchauffez votre four à 210°C et enfournez les madeleines. Une fois la bosse bien formée (au bout de 4 minutes), baissez la température du four à 160°C pour terminer la cuisson (4 min) -> au total entre 8 et 10 min selon votre four (8 min pour le mien en chaleur tournante). |
* Autre idée de mix IG bas : 30 g de farine de maïs + 30 g de farine de sarrasin + 20 g de farine de lupin ou de coco ou de pois chiche + 20 g de poudre d’amande
Conclusion
Merci à Françoise d’avoir témoigné sur son quotidien et celui de son fils Arthur ! Je leur tire mon chapeau car ils restent très optimistes malgré la maladie. Arthur est d’ailleurs un enfant débrouillard et joyeux qui espère beaucoup dans les progrès de la recherche (il a demandé un pancréas artificiel au père Noël)…
Très beau témoignage !
Et quelle réussite pour ces parents.
Cette histoire nous permet de relativiser.
Bonne continuation à cette famille et une vie heureuse a Arthur .
Bonjour,
Je crois lire notre histoire, sauf que notre fils a été diagnostiqué diabétique puis coeliaque à 11 ans. Il n avait aucun symptôme de la maladie coeliaque mais quand il a été hospitalisé à la découverte du diabète, la pédiatre à fait faire automatiquement un dosage des anticorps pour le gluten. Il a une pompe à insuline sans fils que l on change tout les 3 jours et un capteur à glycémie qui nous l indique en passant une petite télécommande devant le capteur, donc finit les nombreux dextros au bout des doigts! Il a 16 ans maintenant et se débrouille comme un chef, il connaît bien le fonctionnement de son corps, mais on suit de très près les avancées médicales en espérant qu’il y ait encore plus de confort dans la gestion des soins au quotidien et pourquoi pas une guérison! En tout cas nous on veux y croire !
Vous avez raison Valérie, la médecine progresse à vitesse grand V dans le domaine du diabète !